La sclérose en plaques (SEP) est une maladie neurologique chronique caractérisée par des épisodes d’inflammation du système nerveux central. Ces épisodes, appelés poussées, peuvent survenir de manière imprévisible et entraîner l’apparition ou l’aggravation de symptômes neurologiques. Reconnaître une poussée de SEP est crucial pour une prise en charge rapide et efficace. Bien que les manifestations varient d’un patient à l’autre, certains signes cliniques sont caractéristiques et doivent alerter. Comprendre ces signes permet aux personnes atteintes de SEP et à leur entourage de réagir promptement et d’optimiser la gestion de la maladie.

Symptômes neurologiques caractéristiques d’une poussée de SEP

Une poussée de sclérose en plaques se définit par l’apparition de nouveaux symptômes neurologiques ou l’aggravation de symptômes préexistants, persistant pendant au moins 24 heures en l’absence de fièvre ou d’infection. Ces manifestations reflètent l’atteinte de différentes zones du système nerveux central et peuvent varier considérablement d’un épisode à l’autre.

Les symptômes d’une poussée s’installent généralement de manière progressive sur quelques jours, atteignent un pic, puis régressent spontanément sur plusieurs semaines. Il est important de noter que tous les changements dans l’état neurologique ne constituent pas nécessairement une poussée. Certaines fluctuations temporaires des symptômes, notamment liées à la chaleur ou à la fatigue, ne sont pas considérées comme des poussées à proprement parler.

La durée et l’intensité des poussées peuvent varier considérablement. Certaines poussées peuvent être légères et passer presque inaperçues, tandis que d’autres peuvent entraîner des déficits neurologiques importants nécessitant une prise en charge médicale urgente. La fréquence des poussées est également variable d’un patient à l’autre et peut évoluer au cours de la maladie.

Manifestations visuelles et oculomotrices de la poussée

Les troubles visuels sont fréquemment rapportés lors des poussées de SEP et peuvent constituer un signe d’alerte précoce. Ces manifestations oculaires résultent de l’inflammation des voies visuelles, notamment du nerf optique ou des zones cérébrales impliquées dans le traitement des informations visuelles.

Névrite optique rétrobulbaire et troubles de la vision

La névrite optique rétrobulbaire est une manifestation caractéristique de la SEP. Elle se traduit par une baisse rapide et souvent unilatérale de l’acuité visuelle, accompagnée de douleurs lors des mouvements oculaires. Vous pouvez ressentir une sensation de voile devant l’œil affecté ou une altération de la perception des couleurs, en particulier pour le rouge. La récupération visuelle est généralement progressive sur plusieurs semaines, mais peut parfois être incomplète.

D’autres troubles visuels peuvent survenir lors d’une poussée, tels qu’une vision floue, des scotomes (zones aveugles dans le champ visuel) ou une perte temporaire de la vision. Ces symptômes peuvent être particulièrement invalidants et affecter votre qualité de vie quotidienne.

Diplopie et nystagmus dans la SEP

La diplopie, ou vision double, est un autre signe oculaire fréquent lors des poussées de SEP. Elle résulte d’une atteinte des voies nerveuses contrôlant les mouvements oculaires. Vous pouvez percevoir deux images distinctes, particulièrement lors des regards latéraux. Cette diplopie disparaît généralement à la fermeture d’un œil.

Le nystagmus, caractérisé par des mouvements involontaires et saccadés des yeux, peut également apparaître ou s’aggraver lors d’une poussée. Il peut entraîner une instabilité de la vision et des difficultés de fixation visuelle.

Syndrome vestibulaire central et vertiges

Les vertiges et troubles de l’équilibre sont des symptômes fréquents lors des poussées de SEP. Ils peuvent résulter d’une atteinte des voies vestibulaires centrales dans le tronc cérébral. Vous pouvez ressentir une sensation de rotation ou d’instabilité, parfois accompagnée de nausées. Ces vertiges d’origine centrale se distinguent des vertiges périphériques par leur caractère persistant et leur association fréquente à d’autres signes neurologiques.

Les troubles visuels et vestibulaires lors d’une poussée de SEP peuvent être très handicapants et nécessitent une évaluation médicale rapide pour une prise en charge adaptée.

Troubles sensitifs et moteurs lors d’une exacerbation

Les manifestations sensitives et motrices sont parmi les symptômes les plus fréquents et les plus caractéristiques des poussées de sclérose en plaques. Elles reflètent l’atteinte des voies sensitives et motrices au niveau du cerveau, du tronc cérébral ou de la moelle épinière.

Paresthésies et hypoesthésies focales

Les troubles sensitifs se manifestent souvent par des paresthésies, décrites comme des sensations anormales de fourmillements, picotements ou engourdissements. Ces sensations peuvent toucher différentes parties du corps, de manière asymétrique. Vous pouvez par exemple ressentir des fourmillements dans une main, un bras, ou une moitié du visage.

L’hypoesthésie, ou diminution de la sensibilité, est également fréquente. Elle peut concerner la sensibilité superficielle (tactile, thermique, douloureuse) ou profonde (proprioception). Le signe de Lhermitte , caractérisé par une sensation de décharge électrique le long de la colonne vertébrale lors de la flexion du cou, est évocateur d’une atteinte médullaire cervicale dans la SEP.

Faiblesse musculaire et fatigue neuromusculaire

La faiblesse musculaire est un signe moteur fréquent lors des poussées. Elle peut toucher un ou plusieurs membres, de manière asymétrique. Vous pouvez ressentir une difficulté à effectuer certains mouvements, une lourdeur d’un membre, ou une fatigabilité musculaire anormale à l’effort. Cette faiblesse peut s’accompagner de troubles de la coordination (ataxie) ou de tremblements d’action.

La fatigue neuromusculaire, exacerbée lors des poussées, est un symptôme invalidant de la SEP. Elle se caractérise par une perte d’énergie disproportionnée par rapport à l’effort fourni et peut affecter significativement vos activités quotidiennes.

Spasticité et hyperréflexie pathologique

La spasticité, ou augmentation du tonus musculaire, peut apparaître ou s’aggraver lors d’une poussée. Elle se manifeste par une raideur musculaire, particulièrement marquée dans les membres inférieurs. Cette spasticité peut être douloureuse et entraver la mobilité.

L’hyperréflexie ostéo-tendineuse, caractérisée par une exagération des réflexes, est un signe d’atteinte du faisceau pyramidal. Elle peut s’accompagner de l’apparition de réflexes pathologiques, comme le signe de Babinski au niveau des pieds.

Dysfonctions sphinctériennes et sexuelles en poussée

Les troubles vésico-sphinctériens et sexuels sont fréquents dans la SEP et peuvent s’aggraver lors des poussées. Ces symptômes, bien que souvent moins visibles, peuvent avoir un impact significatif sur la qualité de vie des patients.

Les troubles urinaires peuvent se manifester par une impériosité mictionnelle (envie urgente d’uriner), une pollakiurie (augmentation de la fréquence des mictions), ou des difficultés à initier la miction. Dans certains cas, une rétention urinaire peut survenir, nécessitant parfois un sondage vésical temporaire.

Les troubles de la défécation, tels que la constipation ou l’incontinence fécale, peuvent également s’aggraver lors d’une poussée. Ces symptômes résultent d’une atteinte des voies nerveuses contrôlant les fonctions sphinctériennes au niveau médullaire.

Les dysfonctions sexuelles, comme une baisse de la libido, des troubles de l’érection chez l’homme ou une diminution de la lubrification vaginale chez la femme, peuvent être exacerbées pendant les poussées. Ces troubles sont souvent sous-estimés et insuffisamment pris en charge, alors qu’ils peuvent avoir un impact important sur la vie intime et relationnelle des patients.

Signes cognitifs et psychiatriques d’une poussée de SEP

Les troubles cognitifs et psychiatriques, bien que moins visibles, peuvent constituer des manifestations importantes des poussées de SEP. Leur reconnaissance est essentielle pour une prise en charge globale du patient.

Troubles mnésiques et attentionnels aigus

Lors d’une poussée, vous pouvez constater une aggravation des troubles de la mémoire, particulièrement de la mémoire de travail et de la mémoire à court terme. Les difficultés d’attention et de concentration peuvent également s’accentuer, affectant votre capacité à réaliser des tâches complexes ou à maintenir votre attention sur une longue durée.

Ces troubles cognitifs aigus se distinguent du déclin cognitif progressif observé dans certaines formes de SEP par leur caractère brutal et potentiellement réversible. Ils peuvent néanmoins être très perturbants dans la vie quotidienne et professionnelle.

Ralentissement psychomoteur et confusion

Un ralentissement psychomoteur peut survenir lors des poussées, se manifestant par une lenteur d’idéation et d’exécution des tâches. Vous pouvez vous sentir comme ralenti dans vos processus de pensée et vos actions.

Dans certains cas, une confusion mentale peut apparaître, caractérisée par une désorientation temporo-spatiale, des difficultés de raisonnement ou une altération du jugement. Ces symptômes peuvent être particulièrement inquiétants pour l’entourage et nécessitent une évaluation médicale rapide.

Labilité émotionnelle et syndrome dépressif réactionnel

Les poussées de SEP peuvent s’accompagner d’une labilité émotionnelle accrue, se manifestant par des changements d’humeur rapides et inappropriés. Vous pouvez ressentir une irritabilité inhabituelle ou des épisodes de pleurs ou de rires sans raison apparente.

Un syndrome dépressif réactionnel peut également survenir, en réponse à l’apparition ou l’aggravation des symptômes neurologiques. Il est important de distinguer cette réaction psychologique normale d’une dépression majeure, qui nécessiterait une prise en charge spécifique.

La reconnaissance des troubles cognitifs et psychiatriques lors des poussées de SEP est cruciale pour une prise en charge holistique du patient, incluant un soutien psychologique adapté.

Diagnostic différentiel et examens complémentaires

Face à une suspicion de poussée de SEP, il est essentiel de confirmer le diagnostic et d’éliminer les autres causes possibles des symptômes neurologiques. Plusieurs examens complémentaires peuvent être réalisés pour étayer le diagnostic et évaluer l’activité de la maladie.

IRM cérébrale et médullaire avec injection de gadolinium

L’IRM est l’examen de référence pour visualiser les lésions de démyélinisation caractéristiques de la SEP. Lors d’une poussée, on recherche l’apparition de nouvelles lésions ou l’augmentation de taille des lésions préexistantes. L’injection de gadolinium permet de mettre en évidence les lésions actives, qui apparaissent rehaussées sur les séquences T1 avec injection.

L’IRM médullaire est particulièrement importante pour visualiser les lésions de la moelle épinière, qui peuvent être responsables de symptômes moteurs et sensitifs. La présence de lésions médullaires étendues sur plus de trois segments vertébraux ( lésions longitudinales extensives ) doit faire évoquer d’autres diagnostics, notamment une neuromyélite optique.

Ponction lombaire et analyse du liquide céphalo-rachidien

La ponction lombaire n’est pas systématiquement réalisée lors de chaque poussée, mais elle peut être utile dans certains cas, notamment pour éliminer une cause infectieuse ou inflammatoire autre que la SEP. L’analyse du liquide céphalo-rachidien (LCR) peut montrer une pléiocytose modérée et une augmentation de la synthèse intrathécale d’immunoglobulines, avec présence de bandes oligoclonales.

La recherche de néoptérine dans le LCR est un marqueur d’inflammation du système nerveux central qui peut être élevé lors des poussées actives de SEP.

Potentiels évoqués visuels, auditifs et somesthésiques

Les potentiels évoqués permettent d’évaluer la conduction nerveuse dans différentes voies du système nerveux central. Ils peuvent mettre en évidence des ralentissements de conduction, même en l’absence de symptômes cliniques.

Les potentiels évoqués visuels sont particulièrement utiles pour détecter une atteinte infraclinique du nerf optique. Les potentiels évoqués somesthésiques peuvent révéler des atteintes des voies sensitives médullaires ou cérébrales.

Examen Intérêt dans le diagnostic de poussée
IRM cérébrale et médullaire Visualisation des nouvelles lésions ou de l’activité des lésions préexistantes
Ponction lombaire Analyse du LCR, élimination des
Ponction lombaire Analyse du LCR, élimination des diagnostics différentiels Potentiels évoqués Évaluation de la conduction nerveuse, détection d’atteintes infracliniques

Ces examens complémentaires permettent non seulement de confirmer le diagnostic de poussée de SEP, mais aussi d’évaluer l’étendue des lésions et l’activité de la maladie. Ils jouent un rôle crucial dans la décision thérapeutique et le suivi de l’efficacité des traitements.

Il est important de noter que le diagnostic de poussée de SEP repose avant tout sur l’évaluation clinique. Les examens complémentaires viennent étayer ce diagnostic et apporter des informations supplémentaires sur l’activité de la maladie. Une approche multidisciplinaire, impliquant neurologues, radiologues et autres spécialistes, est souvent nécessaire pour une prise en charge optimale des patients atteints de SEP.

La reconnaissance précoce des signes de poussée de SEP et la réalisation rapide des examens complémentaires appropriés sont essentielles pour une prise en charge efficace et personnalisée de la maladie.

En conclusion, reconnaître une poussée de sclérose en plaques nécessite une vigilance constante de la part des patients et de leur entourage, ainsi qu’une bonne connaissance des symptômes caractéristiques de la maladie. La diversité des manifestations cliniques, allant des troubles visuels aux dysfonctions cognitives, en passant par les atteintes sensitivo-motrices et sphinctériennes, souligne la complexité de cette pathologie. Face à l’apparition ou l’aggravation de symptômes neurologiques, une consultation rapide auprès d’un neurologue s’impose pour confirmer le diagnostic de poussée et mettre en place une prise en charge adaptée.

La gestion des poussées de SEP s’inscrit dans une approche globale de la maladie, visant à limiter les séquelles neurologiques et à préserver la qualité de vie des patients. Les progrès constants dans la compréhension de la maladie et le développement de nouveaux traitements offrent des perspectives encourageantes pour les personnes atteintes de SEP. Cependant, la clé d’une prise en charge réussie reste la collaboration étroite entre le patient, son entourage et l’équipe médicale, dans une démarche d’éducation thérapeutique et de suivi personnalisé.